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NOS DIFFERENTS PROJETS DANS LA FALEME (2012-2022)

Projet Falémé (2019-2022) – en cours

Cette troisième phase du projet Falémé (2019-2022) s’inscrit, comme précédemment, dans la thématique générale des dynamiques techniques, en lien avec l’histoire du peuplement sur le temps long et avec les variations environnementales. Il se justifie par la découverte récente de sites archéologiques majeurs pour la compréhension du peuplement de l’Afrique en général et de celui de l’Afrique de l’Ouest en particulier. Quatre volets constituent le focus du projet actuel:
1. Caractériser les dynamiques d’occupation anciennes de la Falémé (dir. Katja Douze) : ce volet s’attache essentiellement à l’étude du site du Ravin blanc IV, le premier gisement Acheuléen in situ et en stratigraphie découvert en Afrique de l’ouest. Daté entre 250 et 200 ka, ce large atelier de taille s’avère dès lors contemporain, voire postérieur, à certains sites du Middle Stone Age ou à des vestiges d’Hommes anatomiquement modernes, et pourrait témoigner d’une mosaïque culturelle à la période d’émergence des Homo sapiens. Un site additionnel, le site du Chacal, vient s’ajouter à ce corpus sur les occupations anciennes de la Falémé.
2. Discerner le passage des derniers chasseurs-cueilleurs aux sociétés productrices (dir. Eric Huysecom & Matar Ndiaye) : la découverte de plusieurs sites du Late Stone Age in situ et bien stratifiés, dans un contexte paéloenvironnemental maintenant bien cerné, ont été datés à partir de 17’000 calBC (OSL et C14), certains d’entre eux livrant des vestiges céramiques dès 4’500 calBC dans leurs niveaux supérieurs. Cet ensemble de sites constitue un quatrième point sur la carte de l’Afrique de l’Ouest et apporte des données totalement nouvelles sur les derniers chasseurs-cueilleurs et l’avènement des sociétés productrices dans cette région.
3. Documenter la variabilité technologique et culturelle de la métallurgie du fer (dir. Pierre Lamotte & Anne Mayor) : les dernières missions de terrain ont permis d’identifier un Âge du fer ancien remontant au 4e s. calBC, livrant des sites de réduction du fer aux technologies variées, et au moins un site d’habitat en lien. L’étude de ces sites permet de fournir des informations inexistantes jusqu’alors sur le contexte de l’émergence de la métallurgie du fer dans cette partie de l’Afrique et sur l’évolution complexe de sa technologie.
4. Comprendre le rôle de la Falémé pendant la période des grands empires médiévaux (dir. Céline Cervera & Eric Huysecom): la découverte tout à fait exceptionnelle, sur le site de Djoutoubaya daté entre 800 et 1400 AD, de creusets destinés à la transformation de l’or jouxtant un bâtiment quadrangulaire massif en briques évoquant les maisons-fortes des métropoles d’Afrique du Nord, relance toute la question du rôle des mines d’or du Bambouk dans les relations commerciales entre l’Afrique occidentale et le reste du Monde. L’apport de ce site archéologique sera majeur pour une meilleure compréhension du rôle de « l’or africain » au Moyen-Age.
L’objectif de ces thèmes chronologiquement complémentaires est d’apporter des éclairages nouveaux sur plusieurs fenêtres du passé africain à partir de sites au potentiel informatif unique et d’une approche pluridisciplinaire éprouvée depuis plus de 20 ans. L’ensemble des travaux s’effectue en coopération avec l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (IFAN) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), ainsi qu’avec le Musée des Civilisations Noires (MCN) de Dakar. La collaboration étroite entre partenaires européens et africains, dans les domaines de la fouille, de la valorisation des résultats et de la formation de la relève, assure que les résultats escomptés serviront de référence dans les différents domaines abordés.

Projet Falémé – CHeRCHA (2016-2018)

Le projet CHeRCHA (2016-2018), concentré sur les périodes du Paléolithique et du Néolithique, s’est développé conjointement, avec comme objectifs principaux la construction d’un cadre chrono-culturel pour la fin du Pléistocène et l’Holocène ancien/moyen, et la compréhension des changements climatiques et environnementaux et leur impact sur les populations humaines. L’Afrique de l’Ouest est généralement le parent pauvre des modèles d’évolution humaine en Afrique en raison d’un manque de sites bien stratifiés et datés, à l’exception des séquences de référence construites à Ounjoungou, au Mali, par les mêmes chercheurs que ceux impliqués dans CHeRCHA (eg. Tribolo et al. 2015). En sus d’une meilleure compréhension du fonctionnement hydrologique de la Falémé en relation avec ses affluents, les prélèvements sédimentaires ont permis une approche des bioindicateurs sur les sites archéologiques et dans des coupes naturelles. Le projet s’est orienté vers les formations antérieures au Pléistocène récent et l’Holocène à la faveur de la découverte fortuite en 2017, d’un site d’envergure attribué à l’Acheuléen. Ce site majeur et unique au Sénégal, constitue un véritable tremplin pour la poursuite des recherches sur la séquence Paléolithique de la Vallée de la Falémé. D’autres sites Paléolithiques ont également été découverts, notamment pour la fin du Middle Stone Age (37-33 ka), contenant une industrie inédite orientée vers la production de pièces bifaciales. Enfin, ce projet a permis les datations absolues par OSL des principales séquences Pléistocènes et Holocènes de la Falémé, présentées dans le cadre d’une thèse doctorale soutenue en 2018 à l’Université de Bordeaux Montaigne (Lebrun 2018), et une compréhension approfondie de la géomorphologie de la vallée de la Falémé et de ses ravins latéraux au travers d’une autre thèse de doctorat en cours d’achèvement à l’Université de Paris Est-Créteil (S. Davidoux).

Projet Falémé (2015-2018)

Le second projet FNS (2015-2018) a eu pour but d’approfondir la thématique des dynamiques techniques, en lien avec l’histoire du peuplement, l’histoire des royaumes pré-coloniaux et les variations environnementales des deux derniers millénaires (Davidoux et al. 2018), alors que les périodes anciennes ont fait l’objet d’une requête indépendante CHeRCHA. La plupart des objectifs ce cette seconde phase du projet Falémé a été remplie, alimentée par de nouvelles découvertes. Il s’agit notamment de la mise au jour, à la faveur de fouilles extensives, d’un plan de bâtiment quadrangulaire en briques daté du 11ème au 14ème siècle AD, unique en son genre, sur le site médiéval de Djoutoubaya. En outre, plusieurs sondages périphériques effectués en 2018 ont montré l’importance de l’étendue du site ainsi qu’une conservation exceptionnelle des restes organiques et céramiques. La poursuite des prospections sur le thème de la métallurgie du fer a conduit à la découverte en 2017 de types de fours uniques et particulièrement anciens (dès le 4ème siècle BC), ainsi qu’à des zones d’habitat liés à cette exploitation du fer. L’étude des traditions céramiques dans le pays bedik a montré un contraste très fort avec la vallée de la Falémé, en termes de diversité des techniques et des matières premières en lien avec les communautés de pratiques, et a permis de terminer la constitution du référentiel céramique actualiste. En lien avec ce second projet FNS, deux thèses de doctorat ont été soutenu en 2019, respectivement intitulées Défendre sa communauté pendant l’ère atlantique : étude des fortifications endogènes de la vallée de la Falémé (J. Aymeric) et Étude archéométrique des perles en verre d’Afrique de l’Ouest : vers une meilleure compréhension des dynamiques techniques et commerciales à l’époque des empires précoloniaux (M. Truffa Giachet). Une troisième thèse est actuellement en cours de finition à l’Université de Genève, sur les thèmes de l’ethnoarchéologie de l’architecture vernaculaire (T. Pelmoine).

Projet Falémé (2012-2015)

Le premier projet FNS (2012-2015), exploratoire, a permis plusieurs découvertes majeures. Concernant le Pléistocène, les travaux de terrain ont révélé, pour la première fois, une histoire environnementale et humaine complexe au cours de l’OIS 2 (environs 24 ka à 14 ka), au travers de différents sites (Chevrier et al. 2016, 2018 ; Lebrun et al. 2016), alors que cette période se caractérise généralement par un hiatus sédimentaire et archéologique en Afrique sahélo-soudanienne. La nécessité de mieux cerner la chronologie absolue des sites Pléistocènes au sein des séquences climatiques et environnementales dans la Falémé a donné lieu au développement d’un projet ANR-FNS spécifique (2015-2018) intitulé « CHronology of Rapid Climatic Changes and Human adaptation in West Africa » (CHeRCHA) sur lequel nous reviendrons. La période Holocène moyen et récent, qui voit l’émergence de la céramique et des techniques de production vivrière est restée plus difficile à cerner alors que les données sont nombreuses pour les deux derniers millénaires. Les études ont porté sur les sites d’Alinguel et Toumbounto documentant ensemble une période allant de 2ème au 19ème siècle, qui voit des changements importants dans l’architecture, la céramique et l’économie de subsistance. Un vaste habitat médiéval a également été découvert sur la rive droite de la Falémé : le site de Djoutoubaya. La découverte de nombreux creusets semble indiquer qu’il existait alors une transformation de l’or sur le site. Ce premier projet FNS a également vu une première fouille du fortin de Farabana, documentant la phase de transition entre les sociétés précoloniales et coloniales en deux phases d’occupation. En parallèle, dans le domaine de la métallurgie, les enquêtes auprès des forgerons et les prospections ont révélé de nombreux sites de réduction du fer, avec des fours bien conservés, indiquant plusieurs traditions techniques. L’ethnoarchéologie de la céramique a montré quant à elle la grande homogénéité actuelle des techniques de façonnage, des recettes de pâte et des argiles récoltées sur des berges de la Falémé, ceci quel que soit l’identité des artisanes installées sur le territoire de l’ancien royaume peul du Boundou (Cantin & Mayor, 2018). L’ensemble de ces découvertes (Huysecom et al. 2012 à 2016) a permis d’évaluer les axes majeurs à développer, à savoir l’histoire du peuplement et les dynamiques techniques des deux derniers millénaires, ainsi que la reconstruction des variations climatiques et paléo-environnementales et les datations absolues, notamment pour le Paléolithique. Une thèse a également récemment été soutenue à l’Université de Genève sur la Protohistoire et l’émergence du Royaume du Boundu, qui s’étendait sur les berges de la Falémé (Loukou 2018).